Paris vous aime magazine Juillet-Août-Septembre 2024
tants. Grâce à lui, j’ai commencé à photographier des buts, des gardiens qui plongent… Ça m’a servi plus tard. Kopa avait le même prénom que moi, Raymond. Il était très mince et plus petit. Pelé, c’était l’exotisme. Je me suis retrouvé dans les douches du stade. J’étais timide, mais beaucoup moins avec un appareil. Je ne devais pas être seul. Personne ne m’a expulsé, c’était naturel, incroyable. Pelé avait 19 ans et était déjà très connu. J’étais équipé d’un Rolleiflex et d’un gros flash. Il a dû voir la photo, le flash. À l’époque, on allait plus vite, on mitraillait moins. Tchak, tchak, tchak ! On n’insistait pas. Il fallait faire la bonne photo, être au bon endroit, au bon moment. On n’avait pas la possibi lité d’en faire beaucoup. Trois, et puis voilà, on repre nait notre scooter. J’aimais bien le côté un peu Charlot du métier, à la Charlie Chaplin. La photo des douches a beaucoup fait parler d’elle. Aujourd’hui, tout le monde me demande si je pourrais photographier Kylian Mbappé comme ça… Le sport occupe une certaine place dans mon travail. Quelques années plus tard, je me souviens d’avoir photographié des Tchadiens qui s’entraînaient au saut en hauteur. Ils étaient immenses. C’était à Vincennes, à l’Institut national du sport, en pleine décolonisation – une histoire à laquelle je suis moi même lié, car j’ai couvert l’indépendance du Tchad, de la Côte d’Ivoire et de l’Algérie bien sûr. Ça intéres sait beaucoup les Français d’entraîner les sportifs afri cains qui arrivaient. Par la suite, on m’a proposé de suivre les Jeux olym piques de Tokyo en 1964, puis ceux de Mexico, de Munich, de Montréal et, pour finir, ceux de Moscou, en 1980. Toujours en noir et blanc ! Aujourd’hui, je tra vaillerais plutôt en couleur : les Jeux, c’est la fête de la couleur. Je suis d’ailleurs invité cette année à l’inau guration aux côtés de la maire de Paris, M me Hidalgo. Je ferai peut-être quelques photos, seulement je n’ai plus ni les appareils ni la technique. Mais il y aura des clichés intéressants à prendre : plus il y a de contraintes, plus les photos sont fortes. Des photographes vont à coup sûr se distinguer. Comme on dit dans le jargon, il y aura sûrement deux ou trois Fragonard qui sorti ront à l’occasion des Jeux !
This particular match pitted the Brazilians of Santos against the Rémois – Pelé against Kopa. I loved football. I had played right-back for Villefranche-sur-Saône and it was there that I first met a freelance photographer from the newspaper Le Progrès in Lyon, who covered the games. Thanks to him, I started taking pictures of goals, goalkeepers diving for the ball. That came in handy later. Kopa had the same first name as me, Raymond. He was very thin and short. Pelé, he was exotic. I found myself in the stadium showers. I was shy, but less so with a camera in hand. I wasn’t supposed to be there alone, but no one threw me out. It was natural, unbelievable. Pelé was 19 and already very famous. I used a Rolleiflex with a big flash. He must have seen the photo, the flash. In those days we worked fast and took fewer pictures. Tchak, tchak, tchak! And that was it. You had to take the right photograph, be in the right place at the right time because we didn’t get a chance to take many. Three shots and we were back on our scoo ters. I liked the Charlie Chaplin side of the job. There was a lot of talk about the photograph in the showers. Now people ask me if I could have photographed Kylian Mbappé like that… Sport has a special place in my work. A few years later, I remember photographing Chadians training for the high jump. They were huge. It was in Vincennes, at the Institut National du Sport in the midst of deco lonisation – a history with which I am associated, having covered the independence of Chad, Ivory Coast, and Algeria. The French were keen to train the African athletes who were arriving. I was later asked to cover the 1964 Tokyo Olympics, followed by Mexico City, Munich, Montreal, and Moscow in 1980. All in black and white! Today, I prefer working in colour: the Olympic Games are a celebration of colour. In fact, this year I’ve been invited to attend the opening ceremony with the mayor of Paris, Anne Hidalgo. I might take some photos, but I don’t have the technology or the cameras anymore. But there will be interesting shots to take: the more restrictions there are, the stronger the photos will be. A few photographers will stand out and we will most certainly see two or three great iconic photos taken during the Olympics!
Propos recueillis par NATALIE THIRIEZ
Interview by NATALIE THIRIEZ
Photo en ouverture : Pelé au Parc des Princes, 1960 | Pelé in the Parc des Princes, 1960 © RAYMOND DEPARDON / MAGNUM PHOTOS Photo p. 135 : Raymond Depardon, 2021 | Depardon, 2021 © MAXIME JEGAT / MAXPPP
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