Paris vous aime magazine (oct-dec 2023)

QUESTION

L’ÉPINEUSE DE LA DE LA RÉGULATION LIBERTÉ

D’EXPRESSION

Dans un court ouvrage, l’intellectuel néo- zélandais Jamie Whyte montre l’importance de la liberté d’expression et les erreurs commises dans sa limitation.

New Zealand academic Jamie Whyte’s short book shows the importance of

freedom of expression and the mistakes made in restricting it. THE THORNY ISSUE OF REGULATING FREE SPEECH

En collaboration avec Phébé , la veille d’idées internationale par Le Point

Emmanuel Martin Boris Séméniako Docteur en sciences économiques, Aix-Marseille Université

F ree speech is in the spot- light, particularly in the context of the European agreement on the Digital Services Act, calls for increased Internet regulation in the US, including the proposal for a Disinformation Governance Board, and the UK’s Online Safety Bill which aims to regulate online content and is being debated in the House of Commons. Whyte has written a short book on the subject, Why Free Speech Matters , for the Insti- tute of Economic Affairs, London, in which he rst attemps to de ne the concept of free speech by dis- pelling certain misconceptions. Elon Musk’s recent acquisition of Twitter illustrates his point: when the billionaire sought to purchase Twitter, Musk believed the plat- form was overly “censoring”

L’auteur tente d’abord de circons- crire le concept de liberté d’ex- pression en écartant quelques confusions habituelles. La récente «affaire» Twitter-Musk permet d’ailleurs d’illustrer ici l’idée : le célèbre milliardaire souhai- tait racheter Twitter, car la plate- forme pratiquait, selon lui, une trop grande «censure» dans sesmodéra- tions, portant ainsi atteinte, encore selon Musk, à la liberté d’expres- sion. Si l’on suitWhyte, Twitter étant une plateforme privée, elle a parfai- tement le droit demodérer les conte- nus et d’exclure des participants, même un Président des États-Unis, exactement comme un grand jour- nal n’a pas l’obligation de le publier : la liberté d’expression est contrainte par le droit de propriété. La cancel culture ne devient donc un problème et réellement une

L a liberté d’expression est sous le feu de l’ac- tualité, surtout à cause de l’accord européen concernant le Digital Services Act ou les appels à une régulation renforcée du Net aux USA, avec, notamment la pro- position d’un Disinformation Governance Board (Conseil de gouvernance sur la désinforma- tion). Le contexte britannique est comparable à celui de Bruxelles, le Online Safety Bill (visant la régulation des contenus en ligne) ayant été soumis en mai 2021 et étant toujours en discussion après deuxième lecture à la Chambre des communes. Jamie Whyte a écrit sur le sujet un court ouvrage intitulé Why Free Speech Matters pour l’Institute of Economic Affairs à Londres.

censure que lorsqu’elle est le fait de l’État, par la régulation de la liberté d’expression (au-delà de la fraude et de l’incitation au meurtre, bien sûr). Or cette liberté possède au moins deux avantages. Faut-il poser des bornes ? Elle représente premièrement une condition du débat critique («à la Popper », pourrait-on dire) néces- saire au progrès social et politique, mais aussi, évidemment, scien- ti que, à la base de l’innovation, elle-même source de croissance. Non que cette liberté d’expression élimine cependant toute l’erreur ou toutes les idées de mauvaise qua- lité comme certaines croyances manifestement fausses encore répandues, mais elle génère sur- tout une croissance de la connais- sance, c’est-à-dire aussi une

Twitter étant une plateforme privée, elle a parfaitement le droit d’exclure des participants

As a private platform, Twitter has every right to exclude participants

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