Paris vous aime magazine Octobre-Novembre-Décembre 2022

LUXE : LE TEMPS DES ARTISANS

3 QUESTIONS À Alexandre Boquel

Directeur du développement des métiers d’Excellence chez LVMH Director of Development of Professions of Excellence at LVMH

« Il y a toujours eu une fascination pour ces métiers »

“ There is an enduring fascination for these crafts ”

How do you explain the renewed interest in craft trades? These metiers have always

Comment expliquez-vous le regain d’intérêt pour

les métiers de l’artisanat ? Il y a toujours eu une fascination pour ces métiers. Mais, ce qui a changé, c’est l’attractivité. Il y a un véritable mouvement de fond depuis une dizaine d’années. Déjà, nous avons basculé vers le digital, ce qui a créé une

fascinated people. What changed is their attractiveness, as there have been fundamental changes in the last ten years, as we all switched to digital and spent our time staring at

screens and increasingly missed doing things. And then the pandemic acted as an accelerator, causing us to reassess the meaning of work. Artisans touch materials, know their origins, and handmake objects that are durable and can be passed on. Never before have so many people come to us for training. Are the métiers d’art in danger? This heritage is as fragile as ever. The Comité Colbert has identified 20,000 craft professions that have not been filled in France this year, a figure that doubled in a year. This vulnerability has historic reasons, the industrial revolution caused us to overlook these trades; and these professions are particularly demanding. To become a jeweller, for example, requires seven years of training, as well as great passion and professionalism. How will these skills inherited from the past be used in the future? In the collective unconscious, historical crafts don’t evolve. But in reality, every profession changes. Being a couturier is very different from what it was 20 years ago. There are, of course, handicraft techniques that we perpetuate, but crafts innovate when necessary. Moreover, craftsmanship is one of the sectors best fitted to respond to environmental challenges. The craftsperson collects, transforms and recycles materials. Our brands create objects that are built to last and that can have a second life. This circularity is at the heart of what we do.

frustration du présentiel, du faire. Et puis, il y a eu un accélérateur: la pandémie, qui nous a fait repenser la question du sens du travail. Les métiers de l’artisanat touchent la matière, maîtrisent sa provenance, aboutissent à des objets qui peuvent être durables, transmis. Jamais autant de personnes ne sont venues nous voir pour se former. Est-ce que les métiers d’art sont en péril ? C’est un patrimoine fragile et il ne l’a jamais autant été de toute l’Histoire. Le comité Colbert recense 20000 offres dans l’artisanat qui n’ont pas été pourvues en France cette année, c’est une première et le chiffre a doublé en un an. Cette fragilité, on la doit à plusieurs choses, et la première est historique. Avec la révolution industrielle, on est passé à côté des métiers du faire. Il est évident que ce sont des métiers Comment ces savoir-faire hérités du passé se conjuguent au futur ? Dans l’inconscient collectif, les métiers d’art n’évoluent pas. Mais en réalité, tous les métiers évoluent. Celui de couturier n’est plus le même qu’il y a vingt ans. Évidemment, on pérennise des gestes, mais dès que c’est pertinent, les métiers innovent. De plus l’artisanat est l’un des secteurs qui est le plus propice à répondre aux enjeux environnementaux. L’artisan est le garant de la matière: il la récolte, la transforme et la recycle. Nos maisons créent des objets qui ont vocation à être durables, peuvent avoir une deuxième vie. Cette circularité, elle est au cœur de nos occupations. exigeants. Être joaillier nécessite sept ans de formation, il faut de la passion, de l’exigence.

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