PARIS VOUS AIME MAGAZINE - N° 3

SUR INTERNET VOUS PENSIEZ SAVOIR TOUT CE QUE FAUX (SANS DOUTE) EST

L’anthropologue Alberto Acerbi démonte un certain nombre d’idées reçues que nous avons sur le Web et sur son impact social et cognitif.

Anthropologist Alberto Acerbi dismantles some of our fondest notions about the internet and its social and cognitive impact. EVERYTHING YOU THOUGHT YOU KNEW ABOUT THE INTERNET IS (PROBABLY) FALSE

T he democratisation of new communication technol- ogies has revolutionised information. It moves faster than ever before, penetrates distribu- tion networks more deeply, and is disseminated and copied with a delity and anonymity hitherto unmatched. Metadata (the ratings we give to products purchased online) has never been more acces- sible or abundant. But how do these new game rules affect the culture we consume? How is the internet transforming our relationship to information? Alberto Acerbi’s book Cultural Evolution in the Digital Age [Oxford University Press] offers an innovative analysis. Anchored in the literature of cognitive science and media studies, Acerbi offers a breath of optimism and debunks many of our preconceptions. Among Acerbi’s more surprising assertions is that the social in uence exerted by celebrities is greatly overstated; the use of social networks d s not increase political polarization; and that ‘fake news’ is fairly marginal. He also believes that online users should be regarded as active crea- tors rather than passive consumers, and that algorithms are stupid but very useful. Though ‘in uencers’, social media celebrities, are used to promote products to a large audience, d s their status really make themmore persuasive? Research suggests that celebrity status confers credibility

crédibilité que lorsque le produit promu tombe dans le domaine d’expertise de la star et que son in uence reste cantonnée à des comportements peu coûteux qui coïncident avec les préférences de son audience (tel qu’acheter un dentifrice plutôt qu’un autre). La démocratisation d’Internet n’a pas changé le fait que nous sommes dotés de mécanismes d’apprentis- sage sociaux exibles hautement sélectifs (nous ne croyons pas n’importe qui ni n’importe quoi) et que, en général, nous sommes bien plus têtus que crédules. On reproche souvent à Internet, et aux réseaux sociaux en particulier, d’exploiter notre tendance natu- relle à s’entourer de pairs qui nous ressemblent idéologiquement (ho- mophilie). Cela nous conduirait à nous enfermer dans des chambres d’échos numériques où seules les informations consonantes nous parviennent. Cependant, une quan- ti cation de notre exposition aux informations dissonantes suggère qu’Internet libère plutôt qu’il n’en- ferme. Imaginez une échelle de 0 à 100, où 0 représente une absence de biais d’exposition et 100 signi- e que la totalité des informations consommées est déterminée par notre idéologie. Les informations auxquelles nous accédons par l’in- termédiaire d’Internet se placent à 7,5 sur l’échelle, alors que celles provenant de notre famille et

only if the product falls within the in uencer’s area of expertise, and is con ned to more mundane behav- iours which coincide with the pref- erences of his or her audience, such as buying one toothpaste brand over another. The democratisation of the internet has not changed our highly selective, exible social learning mechanisms – humans don’t believe just anyone or anything – and we generally tend to be more sceptical than gullible. Social networks are often criticised for exploiting our natural tendency to surround ourselves with ideo- logically similar peers (known as ‘homophily’). However, a study of users’ exposure to dissonant news suggests that the internet tends to free us rather than lock us in. On a scale of zero to 100, where zero rep- resents the absence of exposure bias and 100 signi es the totality of the information we receive determined by our ideology, the information we access through the internet ranks at 7.5, while the in uence of our fam- ily and close friends is, respectively, 24.3 and 30.3. It seems we are much more biased of ine than on. It is a given that the internet facil- itates the spread of information, but does this deregulated market favour falsehood to the detriment of fact? According to Acerbi, prob- ably not. The absence of regulation on the internet d s not mean that it is unstructured. Reliable news sites rarely refer to questiona-

En collaboration avec Phébé , la veille d’idées internationale par Le Point

Sacha Yesilaltay, doctorant en sciences cognitives

gnitives et en études des médias, elle souf e un vent d’optimisme et vient balayer un grand nombre d’idées reçues que nous avons sur Internet. Il nous apprend que l’in- uence sociale exercée par les stars est largement surestimée; que l’uti- lisation des réseaux sociaux n’ac- croît pas la polarisation politique; que les informations fausses sont minoritaires sur la Toile…Mais aus- si que l’on gagnerait en précision à décrire les internautes comme des créateurs actifs, plutôt que comme des consommateurs passifs, et que les algorithmes sont stupides, mais aussi très utiles. Les in uenceurs, ces stars des ré- seaux sociaux, sont en mesure de promouvoir des produits auprès d’une large audience en quelques clics. Mais le statut de star rend-il vraiment plus persuasif ? Les re- cherches suggèrent que le sta- tut de star ne confère un gain de

L a démocratisation des nouvelles technologies de l’information et de la communication a boule- versé l’organisation du marché de l’information. Celle-ci se déplace aujourd’hui plus rapide- ment, pénètre plus profondément les réseaux dans lesquels elle se diffuse et se copie avec une délité jusque-là inégalée de façon quasi anonyme. Les métadonnées, comme les notes que nous attribuons aux produits que nous achetons sur la Toile, n’ont jamais été aussi abon- dantes et accessibles. Comment ces nouvelles règles du jeu af- fectent-elles les produits culturels que nous consommons? Comment Internet transforme-t-il notre rap- port à l’information? Alberto Acerbi propose, dans Cultural Evolution in the Digital Age , paru chez Oxford University Press, une analyse ori- ginale de notre ère digitale. Ancrée dans la littérature en sciences co-

© BORIS SÉMÉNIAKO

SEPTEMBRE - DÉCEMBRE 2020

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